Mars 1945. Les avions alliés bombardent l’Autriche. Une ferme isolée où vit une nombreuse famille devient très accueillante aux réfugiés. D’abord une fillette traumatisée, muette : elle a un « dommage de guerre ». Puis un jeune homme efflanqué qui prétend être un peintre souabe du Danube et porte un cylindre recouvert de toile cirée. Bazooka ou tableau enroulé ? Et si c’est bien un tableau, croûte ou chef-d’œuvre suprématiste ? Bientôt, un groupe de militaires allemands, moins mystérieux mais plus dangereux et exigeants, s’invite à la ferme.
Assez vite, la jeune muette retrouve ses esprits, se révèle même subtile ; c’est elle qui raconte ce qu’elle voit, ce qu’elle entend, ce qui s’est passé mais aussi ce qui aurait pu se passer, tout cela avec une finesse acquise malgré elle et un étonnant mélange de douceur et d’humour noir. Les scènes et les rites de la vie quotidienne s’inscrivent poétiquement dans une nature printanière, comme indifférente à la guerre. Quant aux villageois, ils supportent avec dignité les affres d’un conflit qui les prend en otages et qu’ils affrontent avec l’héroïsme sans ostentation des gens humbles. Un petit livre plein d’humanité, petit par la taille mais tellement grand et profond par ses non-dits. Un vrai plaisir de lecture. (C.-M.T. et A.K.)